vendredi 23 mai 2008

Axiomatique et métabologie

1.0 - Je pars du fait que le texte a pour caractère "quasi-transcendantal" d'être labile. Transformable. Ce trait s'actualise totalement dans l'écriture numérique - alors qu'il était quelques fois gommé, inhibé dans l'écriture-papier. La voie me semble donc libre pour la constitution théorique d'une ontologie qui sache tenir compte proritairement de cette qualité remarquable (une métabologie).

1.1 - Ainsi, et pour s'en tenir au régime temporel de la textualité électronique, les délais de publication de l'écriture télématique sont inférieurs à ceux de l'édition, ce qui me permet par exemple d'amender mon texte " en temps réel ", en fonction des informations obtenues, sans les inconvénients d'un différé inopportun etc. Au centre des modifications de ce que nous nommons " texte ", il y a ainsi, précisément, la possibilité de transformer indéfiniment le texte en écrasant ses versions antérieures, auto-destruction où l'e-textualité efface ses traces pourtant initialement publiées.

1.2 - Les technologies numériques transforment tout en chiffres pour ensuite, les transformer en temps de composition, de présentation: et le long de cet axe plurivoque, tout se transforme, la seule question restant de savoir à quelle vitesse; et la seule réponse, d'accélérer.
Le terme "Métabole" traduit et met alors en scène en continue un cycle de transformations textuelles numérisées. Ce sont ces opérations de modification générique et continuée qui sont dans l’hypertexte (un texte qui a pour vocation de mouvementer le texte dont il procède) constamment interrogées.

Ainsi pour Gérard Genette, l'hypertexte désigne « tout texte dérivé d'un texte antérieur par transformation simple [...] ou par transformation indirecte » (1982, p.14). Dans ce sens-là, Ulysse, de James Joyce, est un hypertexte de l'Odyssée d'Homère.
Nous désignons donc dans un sens similaire (mais non identique) par hyperdocument tout document dérivé d'un document antérieur par transformation numérique. Cette transformation est obtenue par le choix d'un principe de navigation correspondant. Chacune des pages générées dans le parcours de lecture est construite par « modules ».

1.3 - L'écriture maintenant s'associe fusionnellement à la forme.
Le graphe sur écran se modifie à même la forme qu'il crée; il se fait comme un échange entre la trace numérique sur l'interface et la forme qui, sur le moniteur, soudain apparaît.
La déconstruction ne soupçonnait pas ce pouvoir: pour elle, la différence différait mais ne se transformait pas. Aucune métamorphose de l'écriture n'était à prévoir.

Or l'échange se fait. Le morphing de la forme et de l'Idée aboutit...

2.0 - Cependant qu’est-ce qui rend possible cette mutabilité, cette capacité extraordinaire de transformation de l’écriture aujourd’hui ?
On pourrait évidemment répondre que ce sont les moyens techniques mis à disposition en vue d'un tel exercice qui expliquent et rendent compte de cette formidable aptitude, apparemment si naturelle. La multiplicité des figures qu’emprunte l’écriture sur le réseau (par texte, son et vidéo) ne serait en somme que le résultat d’une technologie de la communication poussée dans ses plus extrêmes sophistications.

2.1 - Toutefois, n’est-ce pas a contrario dès l’origine ce don de transformation propre à l’écriture qui permet à cette métabolicité originaire de se déployer aujourd’hui si facilement sur écran ?
Cette hypothétique métabolicité générique de la signification, cette capacité quasi-religieuse et symbolique qui s'incarne dans les Ecritures, ne permettrait-elle pas ce passage de la signification imaginaire, cardinale et élargie à la signification dérivée, courante de s’accomplir - partant de la scription la plus classique pour parvenir à la phonographie de la parole enregistrée sur fichiers audio/vidéo ?2.2 - Posons que la signification est d’essence métabolique. Métabolique parce qu’elle est de nature essentiellement imaginaire. Et c’est ce schématisme graphique originaire qui fonctionne au plus près d’un imaginaire radical de la signification qu'il importe maintenant d'interroger…

3.0 - La plénitude du changement se dit en conséquence imaginairement de multiples façons (analytique du changement).
Entre les différentes figures schématiques et la métabole processuelle qui assure la maintenance de toutes ces figures en son centre, se tient un Dispositif d'entre deux. Celui-ci est comme un pouvoir de machination et d'agencement capable de se prêter à l'écriture des plans. Une écriture dynamique.
Nous touchons là à une puissance de transformation originaire. Comme si par l'écriture ainsi transposée nous découvrions un processeur en pleine activité d'échange et de répartition.

4.0 - Notre thèse sera la suivante : le problème de la métabole (métabologie) est tout aussi profond, fondamental, originel que le problème traditionnellement attribué à l'être (ontologie) ou celui du phénomène (phénoménologie).

4.1 - Tout simplement parce que je ne peux venir au problème que pose l'étant qu'à travers celui que pose nécessairement sa mobilité lorsque l'étant se manifeste. Si je pars du problème de l'être au sens le plus abstrait, le concept d'être devient pour moi quelque chose de tout à fait général, quelque chose comme un signe formel; pas même une catégorie, mais quelque chose qui vient au dessus des catégories comme si il était entièrement dépourvu de contenu. Pourtant, les catégories seront toujours définies à partir d'un contenu, alors que l'être est un pur et simple transcendental, plus général encore que les catégories. Dès lors il me devient impossible dans cette optique frontale vis à vis de l'être, de donner vie de quelque manière que ce soit au problème crucial qui concerne l'être. Il devient pour moi une question purement formelle, soumise à la critique des logiciens qui diront : ce n'est là qu'un mot, quelque chose qui n'a de signification qu'en corrélation avec d'autres termes, mais dont la signification concrète disparaît entièrement. En bref, c'est pour cette raison que seul le problème du mouvement - puis celui qui lie ce problème à celui de la manifestation - donne au problème de l'être sa signification et sa profondeur propre.

4.2 - PRINCIPE :La question de la mobilité est posée comme " principiellement " différente de celle de la manifestation comme telle, et de celle, a fortiori, de celle des choses étantes. Ces distinctions fondamentales sont déjà posées chez Aristote.Pourtant la différence de principe entre l'apparition et la chose est toujours déjà affaiblie chez les Grecs, dans la mesure où la manifestation n'est pas radicalement distinguée de l'existence en tant que telle, de la choséité. Seuls les Modernes prépareront véritablement cette séparation accomplie définitivement au cours de notre siècle. Ce qui importait en fait aux Grecs, c'était d'établir la distinction entre les choses du monde ambiant et ce qui nous les révèle. Et ce qui était entièrement distingué, c'est le “gignesthai” d'une part (devenir) et le " ti on " (être) de l'autre.

4.3 - Il appartient certainement à notre époque de faire valoir à son tour, au delà de l’étantité de ce qui est, au-delà de la manifesteté de ce qui paraît, de ce qui se présente, de faire valoir donc la métabolicité, c’est-à-dire le caractère métabolique de ce qui devient, de ce qui survient, de ce qui arrive, de ce qui nous arrive…

Retrouvez ce post traité par huit algorithmes différents dans La métabole
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